La clownerie, ou l’art du rire

Version longue de l’article publié dans le n° de janvier-février 2022 de Cactus-Pays de Redon.

Marie (alias Salivette Pimpon) et Jessica (alias Samantha) sont les deux clownes en chef de l’association La Clownerie, située à Guémené-Penfao. Une association qui va à la rencontre des publics dans les maisons de retraite, à l’hôpital, dans les cafés, et organise des stages d’initiation. Car, clown, ça s’apprend !

Cactus : Clown dans des maisons de retraite, dans des spectacles ou durant des stages d’initiation… Votre association, située à Guémené-Penfao, décline l’art d’être clown sous une multitude de formes. C’est ça être clown : aller au contact de tous les publics ?

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Clowns à la foire Saint-Michel de Guémené. Photo : La clownerie

Marie : L’art du clown est un art du spectacle vivant et c’est aussi l’art du rire. Il n’y a pas d’âge pour se marrer ensemble, partager une bonne rigolade et se bidonner ! Le rire est tellement bénéfique pour la santé et le bien-être, alors, oui, le clown s’adresse à tous les publics, quelque soit leur âge. Évidemment, les spectateurs ne rigolent pas des mêmes choses, ni aux mêmes moments.

En maisons de retraite ou en milieux de soins, les clowns déambulent dans les couloirs, les chambres et les lieux de vie. Ils visitent des personnes vulnérables du fait de leur vieillissement ou de leur pathologie, et ces moments ludiques, de légèreté et de fantaisie sont de vraies bulles de respiration heureuse, et ça leur fait du bien.

Lors des spectacles, c’est souvent l’intergénérationnel qui créé un bon moment de partage entre les enfants et leur famille.

Et puis faire rire, ça s’apprend ! Surtout qu’il existe des techniques de jeu bien précises pour faire rire le spectateur avec talent. C’est pourquoi nous organisons aussi des stages de découverte et de perfectionnement à l’art du clown. Transmettre mon métier à des personnes désireuses de s’amuser est une passion pour moi. Et le plus souvent, on ressort de ces week-ends de stage avec les zygomatiques bien courbaturés ou plutôt bien réveillés !

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Salivette Pimpon. Photo : Antoine Dubroux

Pourquoi devient-on clown ?

Marie : Depuis toute petite, j’ai fait de la gymnastique et du théâtre. J’adorai l’acrobatie et le trampoline. Et puis après mes études en STAPS (Education physique et Sportive), j’ai découvert les arts du cirque. J’ai appris à jongler, à marcher sur un fil, à tenir en équilibre sur une boule.

Et puis un jour, j’ai fait une audition pour un spectacle, le metteur en scène cherchait des artistes de cirque pour monter une pièce de théâtre. Comme je savais un peu tout faire dans le cirque, eh bien, il m’a proposé de mettre un nez rouge pour jouer une scène. Tout le monde s’est marré, je n’ai pas tout de suite compris pourquoi. Car j’avais fait rire malgré moi ! Et c’est à partir de là que j’ai réalisé que ce masque du clown pouvait très bien coller à mon style naturel de jeu : spontané, dans le présent et en rapport direct avec le public.

En 2003, j’ai commencé à me former dans des stages professionnels, notamment au sein du Pôle National du Cirque et du Clown, à Paris, dans le Cantal… J’y ai appris les techniques, j’ai construit mon personnage de Salivette et je suis devenue clowne professionnelle en 2009.

Samantha (ou Jessica dans la vie civile ;))

Et vous, Jessica, vous êtes actuellement « clown stagiaire ». Racontez-nous un peu votre parcours de clown ?

Jessica : Moi, j’ai découvert le clown en 2018, un peu par hasard… Il n’y avait plus de places au cours de théâtre et j’ai vu que des cours de clown étaient proposés et animés par Marie Jolion.

Pourquoi pas… J’ai essayé et j’ai adoré ! J’ai rapidement découvert mes capacités à faire rire et l’intensité du partage avec le public. Je me suis aussi beaucoup « bidonnée » et que ça fait du bien ! Je me suis rendu compte que les ressentis et émotions pas toujours acceptés par moi-même ou par mon environnement au quotidien (comme la peur du ridicule, la timidité, les jugements négatifs, etc) étaient de la nourriture pour le clown ! On peut être soi-même à 100%, ça a la droit d’exister et même ça doit exister.

Depuis, je fais régulièrement des stages sur des week-ends avec La Clownerie et mon clown « Samantha » a commencé à prendre forme.

Ces cours et stages ne sont pas à visée thérapeutique mais m’apportent du positif. Un bon et beau loisir.

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Salivette Pimpon. Photo : Antoine Dubroux

Quand vous proposez vos balades clownesques aux personnes âgées, vous allez à la rencontre des résidents. Comment réagissent-ils ?

Souvent les résidents qui voient des clowns « débarquer » en musique dans le couloir ou dans leur chambre, sont d’abord étonnés, comme un peu stupéfaits.

Puis, il y un sourire qui naît sur leur visage. Après, cela dépend évidemment de chacun et aussi du moment de la journée. Mais en général, ils se prêtent au jeu, ils sont contents d’avoir une visite originale, rien que pour eux. Ils nous disent passer un bon moment, ils nous remercient.

Il y en a aussi qui nous questionnent sur nos costumes, nos accessoires, ils sont très curieux ! D’autres nous demandent une chanson ou un poème… Certains nous envoient carrément promener, avec le sourire quand même, mais on comprend vite qu’il ne faut pas insister !

Travailler avec les personnes âgées et les soignants ne s'improvise pas.

Souvent, les rencontres avec chacun, puisque c’est plutôt une démarche individuelle, durent entre 3 minutes et 20 minutes, ça dépend des réactions et des jeux qui naissent de la relation, de l’interaction. Parfois, certains nous suivent dans les couloirs, d’une chambre à l’autre, et on peut finir un service avec un vrai groupe autour de nous !

Et puis pour ceux que l’on visite régulièrement, puisque ces interventions ont pour vocation de s’installer dans le temps, mensuellement par exemple, sur toute une année, eh bien, ils nous attendent, ils sont contents de nous retrouver et on commence à familiariser, à créer un vrai lien avec eux, c’est fort !

Avant chaque balade clownesque, nous rencontrons l’équipe soignante pour connaître les nouvelles récentes, pour glaner quelques informations importantes sur les derniers événements survenus pour certains résidents.

C’est important pour nous d’avoir ces transmissions en amont, car l’on peut d’autant mieux adapter nos interventions en fonction de l’état (émotionnel ou médical ou autre…) de chaque résident rencontré.

Voilà pourquoi on parle de clown hospitalier, en lien avec le soin.

Vous jouez un spectacle « C’est quoi le bonheur ?! », par exemple le mercredi 16 février au Bar le Tempo.

Alors, dîtes… c’est quoi ?

Marie : Sur ce spectacle, je suis seule en scène. Il s’adresse à tous les publics, plutôt à partir de 4 ans, car bien souvent, les plus petits ont peur des clowns.

C’est l’histoire de Salivette qui a fait des découvertes sur les portes-bonheurs lors de ses randonnées un peu partout. Et elle vient pour les partager avec le public. Mais sur la scène, il y a des cadeaux cachés ici et là. Elle pense que c’est une surprise pour elle et les ouvre tous ! Elle découvre une clarinette, des assiettes chinoises à jongler…

Je ne raconte pas tout quand même ! Il y a beaucoup de musique et d’interactions avec le public qui participe aussi au spectacle. Il dure environ 45 minutes, tout dépend de l’ambiance du jour !

Qu’est ce qu’il faut pour « faire le clown » ? Pour avoir la « clown attitude » en somme ? 😉

Marie : En fait, c’est assez rare dans le métier que l’on dise « faire le clown ». On dit plutôt « être clown ». Parce qu’on ne joue pas à faire le clown, mais on « est » clown en jeu, ou dans une situation, et si on réussit à faire rire le public, bien sûr.

D’ailleurs, on parle d’état clownesque. Le clown est drôle malgré lui. Par exemple, il ne fait pas exprès de tomber sur la peau de banane, il tombe vraiment. C’est ça qui n’est pas facile à faire. Donc pour avoir la « clown attitude » en somme, il faut beaucoup de naïveté, il faut beaucoup de joie et d’humour, il faut aussi le plaisir de jouer de tout.

Le clown peut aussi faire des exploits, comme des acrobaties ou de la musique par exemple. Et surtout, il faut avoir envie de faire rire le public, et donc de partager avec lui tout ce qui arrive à notre personnage, en étant authentique et sincère.

Il faut tout jouer à fond !

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Jessica : Oui pour moi la Clown attitude c’est être avec ce qui nous traverse, retrouver notre capacité d’émerveillement, être motivé, positif, content, content d’être content etc… Pas besoin de jouer un rôle, ça vient tout seul. Puis en même temps être ouvert et à l’écoute de l’autre ou du public pour être dans des vraies interactions .

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Retrouvez cet article dans le magazine Cactus-Pays de Redon et son numéro de janvier-février 2022

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