Un album fait de cette étrange « parenthèse »

Album "Ce sont nos parenthèses"

Timothée Le Net, accordéoniste installé à La Roche-Bernard, est à l’initiative d’un album collectif réunissant quarante artistes au cours du premier confinement. Une prouesse artistique à l’origine de « Ce sont nos parenthèses » enregistré entre mars et mai 2020.

Il répond aux questions de Cactus.

Présentez-nous votre album « Ce sont nos parenthèses »

Timothée Le Net : Au printemps 2020, privé de copains et d’aventures, j’ai proposé à différents auteur.e.s d’écrire sur cette parenthèse bouleversante qu’était le premier confinement. Certains se sont accommodés d’une suggestion mélodique, d’autres m’ont envoyé leurs mots sur lesquels je posais la musique. Le confinement s’éternisant et offrant un temps inhabituel et précieux à ces échanges, La Compagnie des Possibles (qui accompagne des artistes depuis Peillac) a apporté son regard et son soutien à la création d’un album, témoin d’une poésie nouvelle d’un monde à l’arrêt.

Le disque s’est construit par couches successives, à distance, entre la France et l’Inde, Madagascar et Minneapolis… Quarante personnes ont pris part à ce patchwork : musiciens, auteurs, photographe, graphiste, portés par la beauté chagrinée d’un printemps qui chante, qui pleure et s’interroge.

Le nom de votre album, c’est cette période du premier confinement. En quoi était-ce une parenthèse ?

Le nom de l’album « Ce sont nos parenthèses » est tiré du refrain de la chanson qui ouvre le disque : Parenthèses. Un texte de Eric Planchot (connu pour ses collaborations en mise en lumière de spectacles), chanté par Elsa Birgé.

Nos parenthèses ? Ce sont les précieux échanges que nous nous sommes permis durant cette période contrainte, au temps suspendu. Ce sont ces onze textes, qui nous ont rassemblés quand nous l’a interdit. Ce sont nos états d’âme, nos solitudes, nos rêves, nos peurs, nos manques, le silence, le temps retrouvé, lors de ce printemps particulièrement ensoleillé.

Timothée Le Net est accordéoniste, son univers est ponctué de multiples influences, un vagabondage entre les musiques traditionnelles bretonnes jusqu’aux confins des Balkans sans oublier le jazz et l’improvisation.

Votre vie d’artiste ressemble à quoi en temps normal ?

En temps normal, je travaille dans le but de faire des concerts. Je joue de l’accordéon au sein de plusieurs groupes : L’horloge ivre, Le Quatuor Poisson-Chat, Le bénéfice du doute.

Ou encore Gloze, un nouveau quartet avec lequel on est en cours de création :

Je joue aussi en solo. Avec quelques groupes de musiques à danser aussi.

Lâcher prise...

Et pendant ce premier confinement, comment avez-vous continué à travailler ?

Et bien je n’y arrivais pas ! Par peur de tourner en rond, je me suis décidé à enregistrer par moi-même de nouvelles pièces en solo. Mais, la machine infernale à l’arrêt, je n’avais plus de repères, de concerts ou répétitions en vus pour nourrir l’enthousiasme nécessaire.

Puis après quelques jours à observer ce silence nouveau, à l’apprécier, à m’y projeter, j’ai proposé à Sylvain GirO de mettre des mots sur une ligne mélodique, de causer de ce qu’on vivait.

Quelques jours plus tard, j’ai reçu Fleur de l’ombre, un texte magnifique. De là, je me suis retrouvé comme un gosse, à solliciter des ami.e.s pour écrire, raconter leur printemps.

Et très vite, nous nous sommes lancés dans des enregistrements à distance et plusieurs musiciens ont rejoint ces échanges.

Je crois que je n’ai pas « continué à travailler ». Au contraire, cette parenthèse de quelques semaines m’a permis de lâcher prise et d’oublier un peu le travail. J’ai joué, comme un gosse, avec les mots, les notes, j’en ai perdu la notion du temps, j’ai adoré la confiance et le temps que les copains et copines m’ont accordé.

Livret de l'album "Ce sont nos parenthèses"

Tous les artistes invités à participer votre album ont ressenti la même chose que vous ?

Depuis ces échanges printaniers, je n’ai vu que très peu de participants. On a tous vécu un confinement différent, en ville, en campagne, seul, en famille… Alors j’imagine que chacun a reçu à sa manière ces enregistrements, ces émotions.

Mais la mayonnaise a pris tout de suite et la musique donne à entendre de beaux ensembles. En tout cas, chacun a témoigné beaucoup de confiance et d’enthousiasme.

Le disque vient de sortir et de prendre le chemin des boîtes aux lettres de chacun.

Un modèle économique pour la culture

Les choses ont-elles évolué depuis le printemps dernier ?

La crise s’éternisant, nous ne jouons toujours pas. La parenthèse poétique s’est refermée l’été dernier pour laisser place à d’importants combats. En ce qui concerne le secteur culturel, nous nous mobilisons régulièrement pour la survie de nos métiers. Nous nous interrogeons aussi sur le modèle économique et culturel en place qui étouffe de plus en plus l’expression artistique pour tous. Cette crise est dure mais elle offre une prise de recul nécessaire pour réinventer un modèle plus équitable, moins exclusif, moins cher. Il est tôt encore pour y voir clair. En tout cas, on a très envie de se retrouver, de jouer, de danser.

Faire un disque à distance, c’est une chouette expérience, mais ce n’est pas souhaitable. Du vrai, de l’ensemble ! C’est vital !

Pour écouter le 1er morceau ou acheter l'album en format numérique ou le CD :

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