Le Redon des années 1980

Jean-Lug Buytaert est arrivé à Redon en 1968. Il partage quelques-unes des nombreuses photos qu’il a prise notamment avec son premier appareil photo acheté en 1980. Des diapos re-photographiées avec son appareil numérique.

Cet ancien journaliste a accepté de commenter quelques-unes de ces photos et de partager quelques-uns de ses souvenirs.

« J’ai pris cette photo du quartier de Bellevue alors que j’étais pion au collège (entre février 1978 et juin 1982).
Cette photo doit dater de 1982, je l’avais prise le plus discrètement possible à travers une fenêtre du couloir. »

« J’ai fréquenté le collège et le lycée de Beaumont d’où j’ai été viré.

Au collège Beaumont quand je suis arrivé, j’ai failli avoir un problème. Auparavant nous habitions à Rennes et j’avais pris l’allemand en première langue. Or, à Beaumont, en première langue il n’y avait pas d’allemand. Ma mère m’avait averti que j’allais devoir être ou pensionnaire ou apprendre l’anglais en accéléré. Aucune des deux possibilités ne me plaisait. À la rentrée scolaire en septembre 1968, un autre néo Redonnais comme moi dont le père travaillait à la gare de Redon avait appris l’allemand en première langue. Si nous avons pu poursuivre l’apprentissage de la langue de Goethe en 5ème, c’est grâce à l’arrivée d’un troisième camarade dont le père venait d’être nommé au lycée.

Nous étions donc trois en classe. J’étais le plus mauvais, mais j’étais au-dessus de la moyenne. En fin de seconde, sur mon bulletin de notes avait été écrit : « chute très grave ». Pas question d’aller en 1ère ! « Vie active ». J’ai poursuivi mes études tout seul. Comme quoi rien n’est figé dans la vie… mais 1973 n’est pas 2020. »

Après avoir débuté ma carrière de journaliste à Ouest-France, j’ai poursuivi aux Nouvelles rachetées par Les Infos de La Gacilly, hebdomadaire créé par Yves Rocher en mars 1989.

Jean-Lug
« La photo a été prise en septembre 1988. On aperçoit les locaux des Nouvelles, Place Duchesse Anne.
L’hebdomadaire était dans ces locaux depuis octobre 1986. Il a occupé successivement le rez-de-chaussée et le 1er étage et pour finir le seul 1er étage, jusqu’à son rachat donc sa fermeture en avril 1989.
Un placement idéal au coeur de Redon, comme cela ne se fait plus pour beaucoup de journaux, avec deux avantages : la proximité du bar Le Corossol et la boulangerie pâtisserie Desprès… surtout la pâtisserie. »

« Cette photo date d’avril 1994. C’était la deuxième fois que j’avais pu grimper à l’intérieur de la tour gothique. Le kiosque à journaux a disparu.
Il était situé au milieu du rond-point. »

« Quand j’ai démarré ma carrière de journaliste, j’étais « assistant temporaire de rédaction » (de novembre 1982 à janvier 1985). Je remplaçais le journaliste seul en poste lors de ses week-ends principalement et ses congés.

J’ai définitivement quitté Redon en 1996 pour raisons professionnelles. J’ai été journaliste jusqu’en juin 2019. J’ai fini ma carrière au journal Le Midi-Libre à Bagnols-sur-Cèze (Gard). Aujourd’hui, j’habite un village à côté. »

« Cette photo a été prise en septembre 1988. C’était lors d’une foire Teillouse. Si vous regardez bien ce cliché, à droite de la barrière du haut, se trouve la guérite de la garde-barrière. Pour l’anecdote, l’Office de tourisme-syndicat d’initiatives se trouvait à côté lorsque nous sommes arrivés en 1968.
Il a ensuite été démoli et l’OT-SI a été transféré dans le bâtiment des halles avant d’être là où il est maintenant.
A cette époque-là, les poids lourds transitaient par le centre-ville. La Grand-rue n’était pas encore une zone piétonne. »

« La Micheline [du manufacturier Michelin] effectuait des manoeuvres de rebroussement à hauteur du passage à niveau. Celui-ci était fermé souvent. Une photo du début des années 1980. Une de mes périodes de photos en noir et blanc.

L’hyper-centre vu du clocher.
« Les étaliers par dizaine. Photo prise toujours par moi, du haut de la tour gothique. Il fallait avoir l’autorisation pour y pénétrer et surtout y grimper et, je crois même, pour être accompagné jusqu’en haut. C’était en septembre 1988, lors de la Foire Teillouse. D’ordinaire pour les marchés, les étaliers étaient beaucoup moins nombreux. La Teillouse attirait déjà beaucoup de monde. C’est une manifestation très enracinée dans le terroir, populaire autour de la châtaigne accompagnée bien sûr de sa bolée de cidre. Sans oublier ses concours dont celui de la Bogue d’or et je ne sais s’il existe encore, celui du « mentou ». À son palmarès, figure Alain Madelin ! Mais bon, il n’était pas monté sur scène. »

« Hormis la foire Teillouse qui drainait les habitants du pays de Redon et sans doute de plus loin, Redon m’a toujours semblé être une ville moyenne animée. Certes pas comparable aux métropoles régionales que sont Rennes et Nantes, ni même Vannes.

Puis en 1994, passage du premier TGV Atlantique.

« Si l’aménagement du passage souterrain a été un grand chantier nocturne de la SNCF (RFF n’existait pas l’époque), il n’a pas trop « cassé » ou séparé la ville en deux. Il l’a balafré c’est une évidence. Mais la municipalité d’alors et les suivantes ont toujours cherché à faire vivre ce lieu. Le marché hebdomadaire du lundi en constitue un bel exemple. Sans oublier les manifestations culturelles ponctuelles et autres manifestations, qu’elles soient politiques, syndicales et/ou revendicatives. »

La photo a été prise en avril 1994.

Cactus : Ce qui frappe notamment, c’est la présence d’entreprise qu’on ne pourrait plus voir aujourd’hui dans un centre-ville. Vous évoquez le magasin Janik, qui est au moment de la photo prise ci-dessus (sur la droite) un magasin de jouets et qui était auparavant une entreprise de matériel agricole avec son atelier de réparation au fond…

Jean-Lug : « Des entreprises en centre-ville, c’est effectivement fini. Du moins la tendance ne va pas dans ce sens. À Beaucaire (Gard) où j’ai travaillé, à proximité de son centre-ville, se trouve toujours l’usine d’embouteillage Moncigale du groupe Marie Brizard Wines. Redon accueille quand même l’usine des briquets Bic.

« Quand j’étais à Redon, la ville bougeait. Ce qui ne signifie pas que c’était tous les jours. Le mardi par exemple, les rues étaient vides parce que les commerçants étaient fermés.

« Aujourd’hui son centre-ville souffre. Comme ailleurs. J’ai travaillé à Bagnols-sur-Cèze jusqu’à l’an dernier, une commune de 18 000 habitants qui n’est pas mieux lotie. Redon a la chance d’avoir encore des habitants dans son coeur de ville. Je n’ai pas remarqué, quand je suis passé la dernière fois à Redon, de squats ni de logements insalubres dans les rues perpendiculaires ni même adjacentes. Après je n’y vis pas, donc ce n’est qu’une observation rapide.

« Par ailleurs pour une ville qui compte maintenant moins de 10 000 habitants, je trouve qu’elle est bien fournie en grandes enseignes. Notamment à sa sortie, direction Rennes. Je me souviens du garage Renault qui était en rase campagne ! Et j’avais un copain, dont les parents habitaient une maison aujourd’hui démolie rue Albert-Vibert remplacée par une moyenne surface. La limite commerciale de Redon dans cette direction de Rennes c’était pour moi le magasin de motos Le P’tit Bolide… »

Photo de la Laiterie moderne (ouverte en 1955 sur le site de la minoterie Redonnaise, Quai Surcouf).
« Je l’avais visitée, avec les commentaires du père d’un ancien camarade de classe qui l’a dirigeait encore à ce moment-là. »
« Cette photo a été prise sans aucun doute en 1980 avant la fermeture de l’usine Garnier. Ce cliché a été utilisé lors d’une manifestation culturelle proposée par une nouvelle association à l’époque, Fouet’Cocher.
Un diaporama uniquement en noir et blanc sur le thème de Charlie Chaplin interprétée par une jeune fille. »

« Redon a un long passé de matériel agricole. Garnier était un fleuron dans ce domaine, même si cela peut paraître étonnant de le lire. Dans le Gard, j’ai rencontré des agriculteurs et même des viticulteurs qui faisaient l’association Redon – Garnier. « Du bon matériel », je l’ai entendu deux ou trois fois. »

La Grande-rue avant qu’elle devienne piétonne…
« Je ne me souviens plus de la date de cette photo. Raisonnablement au début des années 1980. »
Début de la rue en mode « piéton » : avril 1987.
La Grande-rue lors d’une des premières foires Teillouse.

Qui dit Redon, dit inondation…

Une image d’Epinal que vous avez prise de nombreuses fois j’imagine ?

« Je ne connais plus les dates. »

« Le premier logement que nous avions occupé à Redon avec mes parents, ma soeur et mon frère, était situé rue du Port. La cave donnait sur le quai Duguay-Trouin. Nous n’étions pas resté longtemps et nous n’avions pas été inondés. Mais je n’avais jamais vu d’inondations avant d’habiter Redon. Et comme Redon est une ville d’eau, avec la Vilaine, le bassin à flots (le port), les inondations m’avaient marquées. »

« Rue des Douves à hauteur de la MACIF et de la Banque de Bretagne où mon père avait travaillé. »
Pont transbordeur Quai Duguay-Trouin avec son barrage. Date inconnue.
« Quand j’allais sur la grande terrasse de notre logement de la rue du Port, je le voyais. Un repère. Rouillé, inutilisé, il me plaisait. Adolescent, je rêvais qu’il puisse un jour pouvoir être transformé en passerelle pour aller jusqu’à la Digue à Saint-Nicolas-de-Redon. Il a été démoli. »

« Je dois avouer que j’ai connu pire. Les inondations des 8 et 9 septembre 2002 dans le Gard. 22 morts et 299 communes sur 353 sinistrées. Avec des confrères de l’hebdomadaire de La Semaine de Nîmes, nous avons parcouru le département en allant à la rencontre des habitants sinistrés. Un reportage qui m’a cassé moralement. J’ai mis plusieurs jours à m’en remettre. Parce que lorsque vous rencontrez à longueur de journées (nous avons dû effectuer des reportages sur deux, voire trois jours) des gens qui ont tout perdu, les jouets dehors, les meubles, les femmes qui pleurent, les hommes désespérés parce qu’ils se sont endettés jusqu’au coup.. Ils ont tout perdu et ne savent pas s’ils vont pouvoir pourvoir continuer à vivre là, savoir si les assurances vont rembourser les dégâts et à quel montant car les papiers, les factures sont partis… c’est déprimant. »

« Depuis un an je suis retraité. Mais les inondations, j’en ai connues encore à Bagnols en raison d’épisodes Cévenols car la rivière Cèze qui se jette dans le Rhône, est sujette aux crues en raison de ces phénomènes. »

Merci Jean-Lug pour ces photos et ces souvenirs personnels.

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